L’impact environnemental du numérique : comment surfer plus vert ?

Le numérique : un invisible pas si immatériel

Lorsque nous parlons d’environnement et d’écologie, nous pensons souvent au transport, à l’industrie ou à l’agriculture. Le numérique est quant à lui souvent perçu comme immatériel, presque inoffensif. Pourtant, derrière chaque clic, chaque email envoyé ou chaque vidéo visionnée en streaming, se cache une réalité énergétique bien tangible. Le numérique consomme de l’électricité, mobilise d’importants équipements informatiques, et génère une empreinte carbone en constante augmentation.

Selon l’ADEME (Agence de la transition écologique), le numérique représente environ 4 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, un chiffre qui pourrait doubler d’ici 2025 si aucune action n’est entreprise. Ce secteur englobe aussi bien les data centers, les infrastructures de télécommunications que les terminaux des utilisateurs (ordinateurs, smartphones, objets connectés…).

Data centers et empreinte carbone : les coulisses de nos clics

Les centres de données (ou data centers) sont des infrastructures physiques qui hébergent des milliers de serveurs fonctionnant 24 heures sur 24. Leur rôle est crucial : ce sont eux qui stockent, traitent et transmettent les données numériques du monde entier.

Le problème ? Ils sont extrêmement énergivores. En plus de leur consommation électrique pour faire fonctionner les serveurs, une quantité conséquente d’énergie est également utilisée pour les refroidir. Ces immenses bâtiments, souvent situés dans des zones industrielles, nécessitent des systèmes de climatisation puissants pour maintenir une température constante, sous peine de surchauffe et de panne générale.

Résultat : selon certaines estimations, un data center peut consommer autant qu’une ville moyenne. Face à cela, des alternatives émergent. Certains acteurs du numérique, comme certaines grandes entreprises technologiques, investissent dans des centres de données plus écologiques alimentés par des énergies renouvelables ou dans des régions froides pour réduire le besoin de climatisation.

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Les terminaux : quand nos appareils pèsent sur la planète

Outre les infrastructures, les appareils que nous utilisons au quotidien ont aussi un impact non négligeable. En réalité, la plus grande part de l’empreinte environnementale de nos appareils se concentre lors de leur fabrication, bien avant leur utilisation.

La production d’un smartphone nécessite l’extraction de métaux rares (lithium, cobalt, tantale, etc.), souvent dans des conditions sociales et environnementales préoccupantes. Ces extractions engendrent pollution, destruction des écosystèmes et forte consommation d’eau.

Ajoutons à cela leur durée de vie souvent courte, liée à l’obsolescence programmée ou logicielle, et nous avons un cocktail peu durable. Par exemple, renouveler son smartphone tous les deux ans alourdit considérablement notre empreinte numérique, bien plus que les données qu’il consomme au quotidien.

Streaming et cloud : attention à la démesure

Les nouvelles habitudes numériques, notamment en matière de consommation de contenus multimédias, aggravent l’impact environnemental global. Le streaming vidéo représente à lui seul plus de 80 % du trafic Internet mondial. Une heure de vidéo en HD sur une plateforme populaire peut générer l’équivalent de 150 grammes de CO₂, soit autant qu’un kilomètre parcouru en voiture.

Les services de cloud computing, qui permettent de stocker nos fichiers à distance et d’y accéder à tout moment, participent au développement des data centers. L’apparente dématérialisation des données cache en réalité une matérialité lourde en infrastructures et en consommation énergétique.

Heureusement, certains progrès technologiques permettent d’optimiser la consommation des plateformes vidéo, comme le passage à des codecs plus performants (AV1, HEVC), ou l’adoption du smart buffering, qui adapte la période de chargement vidéo en fonction du comportement de l’utilisateur.

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Comment surfer plus vert ? Bonnes pratiques à adopter

Il devient essentiel d’adopter des réflexes numériques plus responsables pour limiter notre impact sur l’environnement. Voici quelques gestes simples mais efficaces pour surfer de manière plus écoresponsable :

  • Alléger sa boîte mail : supprimer les emails inutiles (notamment les spams, les newsletters non lues), diminuer l’envoi de pièces jointes lourdes ou utiliser des liens temporaires pour les transferts de fichiers volumineux.
  • Limiter le streaming : télécharger les contenus plutôt que de les regarder en streaming, ou privilégier la qualité standard au lieu de la HD ou 4K si ce n’est pas nécessaire.
  • Éteindre ses appareils : éteindre complètement son ordinateur ou sa box Internet durant la nuit ou lors d’absences prolongées permet des économies d’électricité non négligeables.
  • Éviter les recherches inutiles : enregistrer en favoris les sites utilisés régulièrement ou saisir directement l’URL allège la charge sur les moteurs de recherche.
  • Choisir des moteurs de recherche écologiques : comme Ecosia, qui reverse une partie de ses profits à des projets de reforestation.
  • Prolonger la durée de vie de ses équipements : réparer au lieu de remplacer, acheter reconditionné ou de seconde main, et éviter les renouvellements trop fréquents.

Vers un numérique plus soutenable

Les acteurs du numérique commencent à prendre conscience de leur rôle dans la lutte contre le changement climatique. Des politiques de sobriété numérique émergent à différentes échelles, tant publiques que privées. En France, la loi REEN (Réduction de l’Empreinte Environnementale du Numérique) votée en 2021 vise à sensibiliser aux enjeux écologiques liés au numérique et à développer un usage plus raisonné notamment dans les collectivités locales.

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De leur côté, certaines entreprises s’engagent à réduire leur consommation énergétique, à privilégier l’énergie verte ou à neutraliser leurs émissions de CO₂. L’éco-conception des sites web, c’est-à-dire leur construction de manière à limiter leur empreinte carbone (moins d’images lourdes, meilleure ergonomie, serveur optimisé…), est également en plein développement.

Individuellement comme collectivement, il est donc possible d’agir. Cela passe par la connaissance des enjeux, la mise en place de gestes simples au quotidien et la pression exercée sur les acteurs économiques pour qu’ils intègrent enfin la sobriété numérique dans leur stratégie globale.

Il est important de se rappeler que chaque email évité, chaque appareil chéri plus longtemps, chaque site allégé compte. Si le numérique fait aujourd’hui partie intégrante de notre société, il ne doit pas être une menace silencieuse pour la planète, mais un levier de transition écologique responsable.